Les Homelies

Lazare et le riche, Luc 16, 19-31
Aujourd'hui, dans les textes que l'Église nous propose, il y a tout un enseignement de moralité. Puis, un peu comme l'expression nous dit « comme un cheveu sur la soupe », il y a la lecture de Saint Paul à Timothée entre la lecture du livre d'Amos et l’extrait de l'Évangile selon Saint Luc. Dans l'Évangile d’aujourd'hui, Jésus nous parle un peu de ce qu'il y a de l'autre côté de la vie terrestre, de l'au-delà, de la vie éternelle. Avec le livre d'Amos, nous avons tout un comportement de personnes qui vivent dans l'abondance, qui vivent dans le bien, dans le confort.
Nous avons une autre partie, la partie d'un peuple qui est délaissé. Alors ce texte date du VIIIe siècle avant Jésus-Christ. C'est vers 750 qu'il a été rédigé avant Jésus-Christ. Le peuple hébreu, comme nous le savons, a quitté la terre d'Égypte, le pays de l'esclavage, pour aller vers le pays de la liberté, vers la terre promise. En arrivant dans la terre promise, ils ont vécu la vie communautaire, le partage.
Mais au fil des siècles, ce partage, cette mise en commun va disparaître. Et c'est là où il va y avoir un peu deux classes sociales : ceux qui vont vivre dans l'opulence et ceux qui seront dans la pauvreté, dans la difficulté. Le prophète Amos va dénoncer cela. Un prophète parle au nom de Dieu. Il reçoit des messages dans son cœur ou des images dans son sommeil, comme des rêves, ceux sont des songes. Il doit transmettre, il doit partager, au peuple ou roi, ce que le Seigneur lui demande de dire. Comme la plupart des prophètes, il va être mal vu parce qu'il a une parole dérangeante.
On le sent bien dans cette lecture parce qu'il nous dit « la bande des vautrés n'existera plus, ils vont être déportés ». Et ce sera en vue de la grande déportation vers Babylone. Dans cet extrait de l'Évangile selon saint Luc, Jésus parle aux pharisiens avec un enseignement imagé, le pauvre Lazare et le riche. Le riche, lui aussi, qui vit dans l'opulence dans son château, dans sa forteresse, est au chaud, il est bien, mais il n'a jamais entrouvert la porte de son château pour voir qui était au pied de cette porte. Et c'était le pauvre Lazare qui n'avait rien à manger.
Donc, aujourd'hui l'enseignement de l'Église nous donne, en transposant l’extrait du livre d'Amos 2800 ans après cette lecture, nous posons constaté qu'elle est d'actualité. C'est bien d'actualité ce souci des pauvres, des plus faibles, des misérables, des délaissés. Et on voit bien qu'il y a une classe sociale qui peut grandir, se développer en délaissant les autres. Le souci de l'individualisme, du chacun pour soi, on peut le constater autant dans la conduite ; comment les gens et nous-mêmes, nous avons du mal à respecter les priorités à droite, on double par la gauche, on double par la droite, encore hier, il y a des personnes qui se croient seul au monde.
Je commence depuis trois semaines un peu à découvrir la paroisse, à découvrir et approfondir le projet pastoral que nous avons, et en le lisant, je découvre vos réactions. L’une des réactions correspond très bien à la lecture d'aujourd'hui. Le regard que les gens ont de l'Église, ce regard, bien sûr, est négatif, ça va de soi. À quoi sert l'Église ? Elle ne sert à rien. Elle est vieillissante, peut-être que ces gens-là sont bien contents de demander des services à l'Église, de temps en temps. Mais ça dénote bien là aussi cette pensée de la société. Nous avons une ligne de conduite les chrétiens. Nous avons la loi et les prophètes. Nous avons les commandements du Seigneur. Et Jésus qui a redonné les commandements en rajoutant, d'abord, le premier commandement, « Ecoute Israël, tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit ».
Pour ne pas rester centré sur Dieu, Jésus nous invite à un décentrement de lui-même pour nous tourner vers les autres. Aussitôt, nous avons le deuxième commandement, « tu aimeras ton prochain comme toi-même, il n'y a pas de plus grand commandement que cela ». Cette invitation que Jésus nous fait d'aimer le Seigneur, veut dire qu'il ait l'amour par excellence. Et quand nous accueillons cet amour de Dieu en nous, Dieu nous aime tel que nous sommes, et il va nous aider à grandir, à évoluer, à changer.
Cela s’appelle la conversion intérieure, parce que nous sommes des êtres pécheurs et nous le serons jusqu'à notre mort, c'est une réalité. A la fois Dieu nous aime tel qu'on est, mais il n'aime pas le péché qui est en nous. Il va nous aider intérieurement à mettre sa lumière pour nous aider à changer, à changer notre comportement qui parfois est mauvais. Par ce changement intérieurement, c'est notre réaction, notre regard qui va se transformer en charité pour le monde et notre prochain. J'aime beaucoup un verset de l'apôtre Pierre, après la résurrection, quand il rencontre un pauvre malade à la sortie du Temple, de la synagogue, il le regarde et lui dit : « je n'ai pas d'argent, je n'ai rien, mais ce que j'ai, je te le donne ». Pierre avait le pouvoir de guérir, il a guéri cet homme. Mais même si nous n'avons pas d'argent sur nous parce qu'aujourd'hui on paie soit avec le téléphone ou la carte bleue, nous avons moins d’espèce, ce que nous pouvons donner, c'est un regard et un sourire. Ce que j'ai, je te le donne. Par la suite, si nous pouvons, si nous pouvons faire plus, et c'est ce que le Seigneur nous demande, de pouvoir partager avec ceux qui en ont besoin. Même si la société a un regard négatif sur l'Église catholique et sur les Églises en général,
notre mission, elle, nous est donnée de Dieu, de Jésus-Christ pour l'annonce de la Bonne Nouvelle, pour l'annonce de l'évangile qui va à temps et à contre temps de l'esprit du monde. Alors même si nous savons que nous allons nous attirer les foudres sur nous, il faut oser parler, il faut oser dire. Et si nous ne pouvons pas parler au nom de la laïcité dans certains lieux, par nos attitudes, par les actes que nous poserons nous témoignerons de la présence de Jésus-Christ. Par le comportement que nous avons les uns envers les autres, même si parfois ce n'est pas facile, parce qu'on a chacun notre caractère, notre personnalité, nous témoignons aussi de la fraternité qu'il y a entre nous. Jésus le dira : « 35 À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » Et de ce témoignage, nous interpellerons les gens autour de nous. C'est çà être missionnaire. Un missionnaire, c'est avoir ce désir intérieur d'annoncer Jésus-Christ du mieux que nous le pouvons.
La lecture de Saint Paul à Timothée, vient apporter une touche de douceur entre Amos et l'extrait de l'Évangile selon Saint Luc. « Toi, homme de Dieu recherche la justice, la piété, la foi, la charité, persévérance et la douceur.» Il est le curé. Il est le chef de cette communauté naissante. Paul va lui donner des conseils, des consignes. Dans cette communauté naissante, ceux sont des jeunes baptisés. Des jeunes baptisés, donc tout fougueux. Et comme une amie me disait il y a très longtemps, « il ne faut pas prendre l'Évangile pour taper sur la tête du voisin pour lui dire, tu as tort. Voilà ce que dit l'Évangile. Voilà la doctrine que nous devons suivre.»
Avant de taper sur la tête du voisin avec l'Évangile, il faut déjà se regarder soi-même, où j'en suis dans ma vie de tous les jours. C'est là où c'est important quand Saint Paul dit : « Toi, homme de Dieu, recherche la justice, la piété, la foi, la charité, la persévérance et la douceur ». Je dirais, c'est avec ces six mots que nous devons méditer à la maison. La piété, c'est avoir ce désir de la prière. La foi, c'est demandé au Seigneur d'être renouvelé dans notre croyance, c'est ce que nous allons faire dans quelques minutes en la professant. La justice, ce n'est pas condamner ; la justice, dans la Bible, ce mot veut dire la justesse, être juste. Si j'ai tort avec humilité, je les reconnais et c’est être juste là où nous sommes. La charité est l'amour par excellence, essayer de vivre cette charité, donc essayer de vivre l'amour continuellement dans mon quotidien pour aujourd'hui. Et puis, il y a ce mot persévérance, parce qu'aujourd'hui, nous sommes motivés, c'est bien.
Motivés pour bien faire les choses, pour prier, pour venir à la messe, je me suis levé de bonne heure, ou plus ou moins, et je suis là. Mais il faut tenir dans le temps. C'est bien, tous les jours je dis mon chapelet, tous les jours je fais des prières, c'est bien, je suis motivé. Mais il ne faut pas que ça fasse comme le soufflé. Vous savez le soufflé quand il est au four, il est magnifique mais il faut vite le manger parce que quand il sort du four, il retombe rapidement. Cela peut faire la même chose pour nous aussi dans notre cœur et dans notre esprit. C'est plutôt notre esprit qui peut faire comme le soufflé. Il y a le désir intérieur, et hop, il peut retomber ce désir. Paul parle de persévérance. Même si je n'ai plus envie, même si je n'ai pas le désir, le goût, je fais quand même la démarche de prier tous les jours un peu ou un peu plus, de poser des actes, d'essayer d'aimer. Même si je me suis levé du mauvais pied ce matin, avec mon caractère qui est désagréable pour le prochain, je fais un effort, je persévère pour être sympathique. Et puis, j'aime beaucoup le dernier mot, la douceur. Combien plus aujourd'hui dans notre société, nous en avons besoin. Avec tout ce que nous entendons, soit sur le climat, soit avec la politique, ou maintenant avec l'histoire du Covid, tout cela manque de douceur, parce qu'on va nous plonger encore plus dans l'inquiétude, dans notre manière de regarder l'autre.
Demandons lors de cette eucharistie, la grâce au Seigneur d'avoir cette persévérance, d'avoir la douceur et d'être rempli de son amour.
Père Patrick Fauries – Homélie du 28 septembre 2025